carnet d’installation | 23 & 24 août 2023
C’est à mes animaux que je pense le plus en ces circonstances de ciel brûlant privé de vent, juste un peu de brise le matin et puis tout refermer des portes et des fenêtres car ça grimpe vite au thermomètre, et soudain je m’inquiète pour la chatte disparue, sans doute dans un fourré bien épais où elle va attendre tout le jour, inerte et patiente, mais je m’inquiète davantage pour les poules qui, elles, ont peu de moyens pour lutter quand bien même jouissant d’un abri en pierres de granit, oiseaux si légers familiers, l’une d’elles éprise en ce moment de couvaison alors qu’il n’y a pas d’œuf fécondé à éclore. Je la sors du nid de paille. Elle se laisse faire. Je la prends sous le bras, lui parle, caresse son cou ses ailes, la dépose dans l’herbe à l’ombre pour qu’elle picore quelque chose. J’ai apporté des épluchures, un reste de rillettes oublié par de récents visiteurs, des morceaux de pain. Parce qu’il faut bien qu’elle s’alimente et elle adore le pain. Je me surprends à veiller sur elle comme sur un enfant alors que les autres gambadent sous la vaste ramure du chêne. Ciel tendu à éclater, rebords du monde flouté, on ne sait plus où on en est, routes désertes déroulant leurs méandres où personne ne circule. On est prêt à se séparer de tout. On brûle, le sang aussi. On en est arrivé là, à prier pour que l’eau tombe, pour que le feu stoppe ses ravages, pour que les forêts redeviennent de vraies forêts, pour que les ours blancs survivent, pour que les enfants dorment tranquilles à l’abri des ouragans.
Je rêve de la saison où je vais bêcher à nouveau le jardin, tailler les rosiers anciens. Les tiges sèches tournent au rouille avant de se fondre à la terre. Il n’y a pas d’anges qui veillent en cette heure sans air, dilatée en brasier. Résister attendre dérouler le mystère marcher à pas lents avec le chapeau baissé sur le nez et porter de l’eau toutes les heures là-bas sous l’arbre comme une offrande, fabriquer une mare de fortune pour que les bêtes ailées y pataugent et les autres bêtes aussi si elles veulent, c’est champ libre.
La nuit dernière, la hulotte a chanté tard et longtemps. Je l’ai écoutée avant de retrouver le sommeil.
Photographie, ©Françoise Renaud – au verger, août 2023
Quelle belle description de cet été invivable… Tout est sec les jardins ont pris une couleur de terre brûlée Même les animaux sont épuisés par cette chaleur.
On n’a jamais attendu la pluie avec autant d’impatience. Mon chien a trop chaud sur ma terrasse (hier 45 à l’ombre). Il passe ses journées à l’intérieur et mon ânesse sort la nuit ou le matin très tôt.
Espérons que cela s’arrête rapidement.
quand c’est derrière nous, on a du mal à croire que c’était si pénible à vivre, à traverser…
oui je sais que dans ta vallée, tous les jardins sont calcinés
mais j’espère à présent tes animaux installés dans plus de fraîcheur…
Les Hommes et les Animaux souffrent en cette période et tu as raison, Françoise, il faut être très vigilant car nos Bêtes de compagnie préférées demandent des soins et une attention particulière en ces temps de canicule. Ton texte révèle combien la NATURE dans son ensemble te préoccupe et combien tes poulettes et ta chatte ont de la chance d’avoir un ange protecteur pour veiller à leur bien être.
les animaux sont nos compagnons tout autant que les hommes
impossible de les négliger, de les oublier…
Ton « prendre soi » si présent, vivant, doux et réconfortant, malgré cet irrespirable donné à ressentir et même depuis ici où on y a échappé. « On est prêt à se séparer de tout » […] « Résister attendre » , voilà une autre attente que tu nous proposes. Merci.
ton passage par cette page pour continuer la route ensemble
continuer à s’assembler dans la vigilance et dans la résistance à toutes formes d’empêchement ou de contrainte, trouver le bon moyen pour aller de l’avant…