rosée pareille à une sueur

ce matin au jardin
humidité dans l’ombre du versant et ça frémit perle sourd de la matière profonde de la nuit, si beau… sur les feuilles, sur les fins brins de l’herbe, sur le gras des feuilles, ça perle ça sourd une espèce d’eau pure qui se manifeste en molécules si petites qu’elles se faufilent par les pores des cellules et investissent la peau des fleurs, glissent dans le berceau des feuilles, stagnent à la faveur d’un pétale velouté ou d’une écorce cirée capables de conserver la perle au plus long du matin jusqu’à ce que la chaleur l’absorbe

Photographies Françoise Renaud, octobre 2019

 

comment s’écrit le jardin

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Fleurs, légumes. Je les mêle au jardin. Duo élégant et parfait.
J’aime tellement les cultiver ensemble comme si l’avenir était inscrit entre leurs sillons conjugués, comme s’ils amplifiaient notre utilité et notre fierté de jardinier. Je les entoure de soin. Ils poussent là pas loin de moi, ils semblent à leur place. Les récolter pour les manger me coûte.

Fleurs, légumes. Rien qu’un graine au commencement, un petit cœur de matière qui ne demande qu’à se développer. Rhizome, tubercule, fragment de tige apte à raciner. Il suffit de peu : eau, terre, soleil en suffisance. Chaque fois je m’étonne de réussir. Une tige pointe. Puis plus vite. L’existence s’exprime dans la diversité des organes en croissance, dans la fougue des feuillages s’épaississant en liberté — que parfois je dois guider sous peine de voir mon territoire envahi. Aussi dans ces formes douces et colorées, corolles destinées à orner les allées ou se muer en légumes.

J’envie le temps dont disposent les végétaux. J’admire leur irréductibilité. Fleurs, légumes, combinaisons subtiles. Dans le jardin ou dans l’assiette. Le gracieux et l’intime de la terre.

Photographies ©Françoise Renaud, juillet 2016

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Vases communicants de juillet, avec Louise Imagine

Premier vendredi de juillet. Une journée chaude. Et c’est Louise Imagine que j’accueille avec joie.

Louise codirige actuellement la revue graphique et littéraire La Piscine. Elle est également directrice de la collection photographique Horizons chez Publie.net.
Je l’ai rencontrée récemment, en chair et en os. À présent je découvre ses ouvrages. Certains titres m’interpellent fortement. Inlands, BlancsÉtranges passerelles jetées soudain entre nous comme des évidences. Posée là, une question qui est aussi la mienne : La poésie, la peinture : que disent-­elles, en somme ?
Et puis ses photographies. Travaux souvent exposés (Transphotographiques, rencontres d’Arles) et édités (Blancs, Instant T, La Croisée des Marelles), photographies de plateau, portraits, reportages… tout l’intéresse. L’enfance, les rivages, l’intime… décidément au cœur de notre rencontre.

Nous voici donc réunies à la croisée de l’image et de la poésie, entre énigme et lumière. Nous avons écrit sur un duo de ses photos. Et pour commencer voici son texte.

LE LAC

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L’été à peine installé, la pluie l’avait accueilli.
Aucun nuage n’en avait pourtant annoncé la venue.

La journée s’était déroulée chaudement. Une de ces journées claires où l’on prévoit par hasard de se retrouver entre amis au bord du lac.

Nous avions préparé le pique-nique et les bouteilles d’eau, entassé à la va-vite maillots et serviettes dans un grand sac, pris les masques de plongée des petites, la crème solaire en spray — plus facile à étaler. Nous avions marché quelques temps côte à côte, pressées d’arriver, et malgré nos pieds soulevant la poussière, nos têtes déjà naviguaient dans l’eau douce, apaisante, barbotaient aux côtés des algues noires et poissons argentés.
Après avoir quitté la route, nous nous étions engagés sur le chemin caillouteux Continue reading →