J’ai tiré du silence des images.
Vieilles.
En noir et blanc. Parfois couleurs passées très douces. Des roses, des sépias. Un peu floues.
En ouvrant l’album de famille à même sur mes genoux.
Sa couverture en cuir rouge. Odorant.
J’entendais les voix venir, tout doucement se mêler. Des voix à l’accent de la campagne. Aussi des mots, des appels. Des cris encore. Des pleurs. Et des chansons connues par cœur depuis longtemps.
J’ai tiré de l’oubli des visages. À chaque page.
Des gens quand ils étaient enfants. Des gens tout proches — parents, sœur, frère, cousins. Je les reconnaissais. Et plus loin encore, au-delà de ma naissance. Des fragments intacts tirés de l’histoire de notre tribu comme des tisons encore vivants hors du feu. Tous ces sentiments que l’existence leur avait procurés en bon comme en mauvais. Je pouvais les lire à travers les photos, je pouvais les sentir rien qu’en tournant les pages. Ô chers visages incrustés dans ces bouts de carton glacé dentelé. […]
Texte complet à paraître dans un recueil de textes sur l’enfance
Illustration : photothèque de l’auteur