carnet d’installation | 30 janvier 2023
hier ou avant-hier j’ai vu des gens, ils étaient rassemblés dans la salle du village, ils étaient de tous les âges, un bébé pleurait du côté de l’entrée, ils étaient réunis pour les vœux du maire, ce n’était là encore pour moi qu’un pan de monde inconnu, eux tous vêtus d’hiver, tous arrivés sous l’averse neigeuse devenue plus pressante dans l’heure du rassemblement, la plupart des visages chaleureux et curieux, et dans cet instant-là ça m’a fait du bien du chaud à couler dans le corps, l’impression que l’isolement n’était pas si définitif que ça dans un territoire annoncé comme dépeuplé, la certitude que les hommes avaient toujours su se retrouver autour des feux pour partager un ragoût, une poignée de champignons ou de noisettes, en bref partager la nourriture et la chaleur, alors les regards en coin des uns et des autres s’étaient mués en autant de petits signes à l’entour pareils à des écritures inventées, à des élans spontanés capables de toucher le bras la chair du bras et la peau du visage, alors des incantations émanant des étangs gelés et des hameaux avaient pénétré le seuil de la pièce éclairée, m’avaient éveillé les oreilles, sans doute invitées à la fête elles aussi, naturellement mêlées aux discours des élus et aux murmures des gens, personne ne s’en est rendu compte, voués qu’ils étaient au temps des discours et dans l’attente d’une brioche et d’un verre réconfortant
je disais : du bien du chaud, cette joie inattendue qui prouvait que rien ne s’arrête de ce qui a déjà été construit, que le tissage se poursuit dans l’instant de la vie, de la respiration et de l’écriture
Photographie Françoise Renaud© – Les Fougères, janvier 2023
Les vœux du maire, la fête du village, incompréhensible en ville, indispensable en campagne…
ville et campagne toujours opposées dans leurs besoins et leurs usages…
merci Juliette, amie d’écriture
Beau témoignage et, toujours belle écriture… Merci Françoise.
bien contente de te lire ici, Jacki, toi aussi devenu rural au cœur de la France et amoureux des lieux inédits…
Cet élan qui porte ton écriture belle est toujours luminueux quoi que tu écrives. Merci. On y est. On vient se réchauffer à ton écriture.
j’essaie de faire cet effort de prendre des éléments dans le réel et des émotions dans mon coeur et de faire le mélange… et on sait qu’il faut travailler encore tant que ce n’est pas suffisamment réussi
bienheureuse de te voir suivre mon carnet de saison après celui d’automne en d’autres espaces…
C’est super que tu aies pu assister aux vœux du maire, comme cela tes nouveaux concitoyens ont pu mettre un visage sur les « nouveaux » c’est une très bonne initiative. Malgré le temps il est vrai que dans nos campagnes les gens sont très attachés à ces cérémonies, ça permet de tisser des liens. Merci pour le partage de tes nouvelles aventures.
tisser des liens, voilà ce qui est nécessaire à notre équilibre d’humains
nous parlons, rencontrons, lions des destins…
merci amie Jo…
Tu embellis tout avec tes mots !
bravo pour être venu jusqu’ici
embellir, je ne suis pas sûre que ce soit le mot… disons qu’il y a un mode pour le dire et pour que ça reflète les choses profondes et non seulement les faits bruts
merci Thierry
En te lisant, j’ai la vision d’un film muet. L’enfant pleure mais je ne l’entends pas. Il y a peut-être une rumeur, un bruit de fond, et le maire qui adresse ses vœux, et là encore je n’entends pas. Mais je comprends exactement l’action. Et bien que tu sois hors champs, je te vois, bien droite, à côté de la porte, tu regardes l’assemblée avec intensité. Il y a quelque chose qui se passe et qui a toute son importance.
merci pour ta belle perception
en effet j’ai assisté à cette scène de façon un peu irréelle, enveloppée par les flocons qui couraient dans l’air froid dehors puis par l’atmosphère ouatée du dehors… étranges sensations que j’ai tenté de retranscrire
il s’agit exactement de cette intensité…. écrire est sans doute s’efforcer d’examiner ces choses là qui se passent à proximité du réel…
comme à te lire je ressens cette place trouvée au creux d’un nouveau pays(age)… !
merci Françoise de nous avoir invité-es à trinquer avec toi ! je t’ai citée en « belle lecture » du matin sur mon blog…
à très bientôt découvrir encore tes environs et suivre tes pensées si douces…
quel plaisir de voir quelques amis d’écriture passer par chez moi pour le soutien et l’écho…. oui, très grand plaisir
merci Gwenn d’avoir cité ce lieu protégé que j’essaie d’aménager et de rendre beau
je suis heureuse pour toi que tu sois si bien dans ton nouveau pays et avec les gens aussi. Cela ne m’étonne pas car tu es une personne agréable et ouverte aux autres
je t’embrasse affectueusement et te souhaite le meilleur là où tu es maintenant
ce n’est finalement pas le pays qui change vraiment…
l’air, le vent, la terre, les arbres, les animaux, tout est présent ici comme partout ailleurs et c’est l’hiver… mais c’est nous qui changeons, notre regard qui se déplace, nos mots qui fouillent jamais tout à fait de la même façon
une histoire de détail, d’infini…
j’ai entendu quelqu’un dire cette semaine « la poésie serait notre part d’infini »…
une belle et forte étreinte vers toi jusqu’à la Maurienne…
merci ma belle amie. A bientôt de te lire
Trouver sa place. Dans une communauté installée. Les regards qui toisent, les chuchotements curieux, les gestes de bienvenue un peu gourd.. Est ce le froid de l’hiver ou l’inconnu qui fait peur ?…Avec ce petit pincement au creux du coeur qui ne sait pas nommer l’hésitation à entrer dans le cercle des nouveaux voisins. Pas encore des amis bien sur mais déjà une main tendue, un sourire, un « si vous avez besoin… » et le lien réconforte en levant le verre de le l’amitié. C’est tellement important les gens…
Un très beau texte comme toujours et là tu choisis de mettre en lumière les gens du village, une percée dans le réel, le froid, la neige engourdissent un peu le réel, et soudain l’imaginaire s’estompe, c’est la vie, la vie d’un village, chacun avec son histoire, et la tienne que tu tisses petit à petit…
Avec toute mon amitié
Les voeux du maire : un rituel bien nécessaire en campagne bien apprécié en hiver où chacun sort peu. Ce rassemblement permet de découvrir de nouveaux visages et un nouvel état d’esprit. Le partage du verre de l’amitié rapproche les distances et favorise les relations.
Merci Françoise de nous faire partager ton nouveau monde.
Aller vers les gens du village, c’était la démarche à faire pour imprimer ta présence sur ce lieu que tu as choisi. Ce n’est pas parce qu’on n’a pas de voisin proche qu’on est nécessairement isolés, tous les lieux sont habités, à nous d’aller le découvrir. C’est une belle démarche qui t’a fait rencontrer « les gens » , et toujours une belle façon de nous la raconter.