texte écrit dans le cadre de l’atelier d’été Tiers Livre proposé et animé par François Bon. Cette fois il était question de produire de la matière, de décrire des contextes, des décors. Absence de personnages. Et toujours, se plier à l’exercice pour être plus fort et plus riche après !
extérieurs
Emprunter depuis la rue un étroit sentier bordé d’herbe. Longer le mur en schiste investi par d’innombrables petites fougères. Alors débarquer dans un espace plus ou moins rectangle contenu entre la maison et le poulailler, hortensias en massif prenant une place considérable. Le potager au fond, déjà bien visible depuis le portail, parcelle circonscrite par des cyprès de Lambert difficiles à maîtriser mais protégeant avantageusement des vents d’ouest. Noter le caquètement des poules lâchées sur le terrain. Trois marches de seuil. Un lieu familier. Par-dessus un ciel mouvant, chargé. L’averse pourrait bien venir.
Haute haie taillée reconnaissable à l’approche, réclamant beaucoup de soin. Quelques mètres plus loin, un passage pareil à une voûte protectrice aménagé dans le taillis. Il est équipé d’un portillon en métal jamais cadenassé qui produit à se refermer un bruit singulier annonçant l’éventuel visiteur. Par derrière, la cour pareille à une antichambre invitant à la fois vers le jardin plus vaste et vers la maison tout près ornée de rosiers sauvages envahissants, la voix venant de la cuisine, entrez mais entrez donc, le soleil encore doux, l’odeur du végétal qu’on a arrosé il y a peu.
Plateforme en pente assez marquée en haut de la plage – donc plein vent, face au plan infini de la mer — avec un arbre large façonné par le climat, jamais soumis, résistant. Folles et fortes branches. Tronc qu’on dirait travaillé avec des outils de sculpteur. L’arbre couvre une trentaine de mètres carrés, peut-être plus, et empiète au-delà de la falaise. Presque il se tend vers le lointain comme s’il voulait basculer dans le vide. Sous la ramure, un banc justement placé – depuis quand ? — pour regarder la mer, écouter, méditer, s’asseoir avec quelqu’un — pour peu qu’on ait quelqu’un avec qui s’asseoir.
Port et môle, une promenade de tous les jours. Villas cossues en face, coteau planté de beaux arbres accoutumés aux vents violents. Ancienne minoterie. Goulet vers le canal qui remonte dans les terres. Belles volées d’oiseaux autour des mâts. Port, bateaux, oiseaux. Un lieu pour s’embarquer.
Genre d’esplanade vaste comme un champ de course. Ombres et lumières. Théâtre d’un bord, centre commercial de l’autre. Va-et-vient incessants. Lignes de vie.
Photographie: Camillo Corsetti Antonini (unsplash)
Cela sent l’iode … et les embruns vous fouettent le visage et les sangs. Chouette!
Un sentier. Et nous arrivons étonnamment à sur un bord un Théâtre et de l’autre un centre commercial. Seule l’écriture permet ça.
Fougères, hortensias, cyprès, haute haie, taillis, rosiers sauvages, arbre imposant. ça sent bon la nature généreuse. Et puis une autre vie avec les poules. Le portillon, les marches qui incitent à entrer dans la cuisine. Plus loin les villas cossues, puis le port avec les mâts et les oiseaux. Merci de nous emmener en promenade au théâtre d’un bord.
Planter un décor… C’est le premier exercice avant de créer personnages et corps du sujet… Et là, on y est… sur le chemin, à l’entrée du jardin, dans la cour, sur la promenade du bord de mer pour terminer dans la ville. Alors intervient tout l’art de l’artiste qui nous donne l’envie de savoir ce qui va se passer dans tous ces lieux qui ne demandent qu’à être HABITES…
Un endroit sans personnages et pourtant si habité. Rien n’ échappe à tes sens en constant éveil. Tu pourrais prendre la main d’un aveugle qu’il verrait tout du paysage, et plus encore de ce décor, il sentirait la vie d’avant, la vie du ici et maintenant, ressentant un tel sablier grains de beauté…
Tu as planté le décor… j’irais bien m’asseoir sur ce banc, sous la ramure si tu venais près de moi.