moment de la venue au jour
moment du cri, la douleur de chair chez elle escortée par le cri
moments suspendus, seule avec le tout-petit avant de rentrer à la maison
moments de séparation, le passé le présent, le noir le blanc, l’avancée le retrait, quand tout se défait s’enflamme se déballe se détruit
moment au centre du bâtiment où se promènent les monstres et les fantômes de la nuit
l’espace, la chute sans fin, le corps qui plonge dans la stupeur à cause des pensées noires
sans cesse l’enfance à rebours
sans cesse l’appel à la tendresse
et puis la peur à cause de l’autre incapable de tendre la main, à cause des résurgences brûlantes de l’enfance qui obscurcissent le cerveau et déroulent des scènes oubliées, film muet en noir et blanc projeté en boucle et en arrière-plan
moments à peine entrevus dans la brièveté d’une lumière clignotante, aveuglante, chargée des poussières de planètes lointaines, le genre de lumière qui réanime d’autres moments écartés du souvenir comme passés à la trappe
moments exempts de sens avec sensation de déchirure si intense qu’elle ne peut être dite
moment de miracle face à l’aube nouvelle toute habitée de piaillements d’oiseaux
basculements arrachements lignes brisées secousses séismes violences rapprochements soudains
moments en d’autres pays qui racontent des histoires ignorées
moments de décomposition de l’espoir
secrets rages débordements ardeur des sentiments et des saisons flamboyantes qui tournent en tempêtes
moments d’étreinte, chaleur, mains serrés, regards pour se réconcilier
moments de l’abandon du corps à cause de la fièvre ou de l’amour
moments de grâce avant le soir
écrit autour d'un texte d'Henri Michaux "Moments, traversées du temps"
présences multiples
enlace... entrelace... ce qui entrelace...
l’infini est serpent
« L’habitant de la face en désordre
n’abandonne pas. »
Photographie - mon jardin ©Françoise Renaud, mars 2025
Quelle entreprise, de vouloir rassembler, faire une brassée de ces moments intenses !
C’est dire, sans doute, la passion qu’on a de vivre, l’exaltation, la douleur, l’infinie variété de l’aventure de vivre ! Je m’aperçois, en fin de lecture, que cet écrit s’apparente à Michaux, alors je dirai : sans crainte de la lucidité, sans crainte de la folie !
Et comme l’enfance y reste très présente aussi, dans cette course des moments, je dois dire qu’elle m’a évoqué la course d’une enfant dans un champ, emportée par la beauté des fleurs et qui veut toutes les cueillir !
je n’ai pas encore diffusé cette proposition de texte et vous voilà passant par là, suivant ma course dans le champ
un texte appelé à s’enrichir, se développer comme beaucoup d’autres, allez savoir
merci à vous pour cet accompagnement riche et bienveillant…