Pour ce mois de février, dans le cadre des Vases Communicants, j’éprouve beaucoup de joie à partager avec Philippe Castelneau, écrivain, libraire, ami en littérature. Nous avons échangé des photographies personnelles et nous avons écrit chacun sur la photo de l’autre.
Voici le texte de Philippe.

eau dormante, photographie de Françoise Renaud, déc2015

La rivière enjambe son lit défait, les murs s’écroulent dans le limon ancien, le vent apporte l’eau du monde, déverse sa poudre d’artifices. La crue profonde vient frapper l’émotion, elle brise nos affluents, blesse les cœurs et les gens. Près du lac sombre, on contemple le ciel et les surgissements de la terre. Au bout du chemin, la vallée a basculé dans le piège de l’automne. L’hiver est mis à mal. Les flots tendus ont décimé le docile paysage. Les crapauds sortent de l’eau acide, les bêtes se sont enfuies, la glace et le sang ont remplacé la vie.
La chair est soumise à rude épreuve quand on se tient debout dans la lumière crue des secours. On vit en un autre pays, c’est la géographie de l’angoisse continue. Le midi a volé en éclats, les rêves resurgissent sans prévenir, mais leur sens nous échappe.
De la boue n’émergent que des tessons, les restes de nos vies, un amas de ferraille, petits bagages rendus aux hommes partis de mort violente. Le soleil qu’on croyait éteint s’était caché au monde, il remonte dans le ciel. La brise singulière qui serre le ventre quand l’eau s’éloigne souffle des reflets de bronze sur nos peaux malmenées. Dans la vallée, le réservoir est plein, mais les bêtes enfuies ne sont pas revenues.

Eau dormante, ©photographie de Françoise Renaud, déc 2015

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Les Vases communicants se déroulent tous les premiers vendredis du mois depuis juillet 2009, à l’initiative de François Bon et Jérôme Denis. Marie-Noëlle Bertrand coordonne les publications et inscrit les futurs échanges sur le blog associé le rendez-vous des vases. Il existe aussi une page Facebook. Aux blogueurs de définir un thème, d’associer images ou son à leur texte et d’écrire sur le blog de l’autre.

Mon texte à partir de la photographie de Philippe Castelneau est à retrouver sur le blog Rien que du bruit.

Un commentaire

  1. Abreuvoir, abattoir (comme chez Kurt Vonnegut)… eau stagnante, croupie, qu’il faut lessiver avec des mots-éponges.

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