Ici rien ne change d’un jour à l’autre en dehors du ciel plus ou moins dégagé, de la terre plus ou moins humide d’une averse nocturne. La lumière monte, silencieuse. La vallée est retirée du monde et les oiseaux sont occupés à construire un endroit doux hors de portée des chats dans l’intention d’y pondre, ils sont très inventifs, tirent parti de la moindre fibre ou ficelle.
Les animaux sont passionnants à regarder, à leur contact nous changeons. Nous apprenons de nous.
contact lien attachement relation émotion regard main qui se tend qui caresse la tête le poil le dos contact étreinte attraction affection… comme tout cela nous manque…
Il n’y a pas longtemps j’ai lu un livre qui m’a brûlé les mains, l’histoire d’une poignée de personnages passionnés (scientifiques, techniciens, philosophe…) embarqués à bord d’un vieux brise-glace norvégien pour une campagne d’actions contre la pêche illégale. Ils étaient prêts à affronter en direct la cruauté, « prêts à donner leur vie pour sauver une baleine », à dégainer les armes si nécessaire. Leur capitaine, Magnus Wallace, figure charismatique de la défense du vivant, commodément traité d’activiste violent par les autorités, était la bête noire des mouvements écologistes. Il défiait les périls en ces routes de la mer où l’action s’impose comme un acte vital au-delà de toute légalité.
« À quel point de la courbe de sa vie croyez-vous que la terre soit arrivée ? L’heure est grave… ».
Ainsi parlait Magnus.
« Nous nous occupons des choses qui n’appartiennent à personne et dont tout le monde peut abuser. »
Je repense au journaliste norvégien qui racontait cette campagne, observait, filmait des séquences à frapper les esprits pour mettre en lumière les pillages organisés à des fins commerciales et les massacres perpétrés en toute impunité. Comment ne pas se questionner en cette période de repli sur le devenir de notre terre et de ses océans, des espèces qui les peuplent, indissociables du devenir du genre humain ? Contempler le désastre ne peut plus suffire. Il faut agir pour protéger les fondations de notre monde que nous reconnaissons si beau et si divers, et avec lui toutes ses formes de vie.
J’ai cherché les grands poissons, les mérous géants, les espadons, les requins monstrueux. Ils avaient disparu. J’ai regardé la mer intouchée et la mer épuisée. Au cœur du Pacifique, dans le nœud de ses courants vers le nord, j’ai filmé la grande décharge du monde : sur trente mètres de profondeur un continent de plastique, sacs, bidons, bouteilles, de toutes les marques, dans toutes les langues et de toutes les couleurs. Jusque dans ses espaces inatteignables, le globe terrestre devenait l’égout des hommes.
Aujourd’hui reclus dans nos maisons, affrontés à l’évidence, nous songeons à ce que pourrait être le monde, à l’état dans lequel nous aimerions qu’il demeure. Nous allons recommencer à désirer. Alors les choses pourraient-elles changer, la dégradation s’inverser ?
Photographie : Jeu de lumière sur une gorgone, ©Charlotte Renaud, 2019 (Lifou, Nouvelle Calédonie)
en cette période de confinement on se rend à l’évidence qu’on peut se contenter de moins et arrêter la frénésie de consommation, mais surtout apprécier ce que l’on a, puisque nous avons la chance d’avoir beaucoup…
souhaitons que ce coup de frein magistral soit salutaire à la planète
Confinement, réflexion, remise en question. Pas un luxe de remettre les pendules à l’heure de temps en temps.
Du temps, nous en avons maintenant, c’est donc le moment de réfléchir comme tu nous le montres dans ce très beau texte.
Il y a aura « un après » mais l’homme aura t-il suffisamment pris conscience de la réalité « actuelle » malgré toutes les engagements, les alertes donnés par les scientifiques..
souhaitons le et essayons, chacun à notre niveau, de faire un peu pour cette planète
Certes nous avons tout le temps nécessaire pour méditer, philosopher et réfléchir… espérons qu’au moins tout ceci fasse évoluer l’avenir vers plus de sagesse et fasse changer la donne…
J’ai lu ce très beau livre « Le règne du vivant » qui répond à ta « Pulsion Vivre » echos de vie et de nature à préserver.. Dans ton jardin avec chats et oiseaux plantes et fleurs j’ai envie simplement de sourire à la Vie en t’imaginant le nez en l’air ou semant des graines de vie pour des lendemains chantant…Jacqueline.
Ah la lecture… Si précieuse et parfois si prémonitoire. Pour notre cercle de lecture, nous avons découvert grâce à Régis Penalva un sublime ouvrage qui mêle poésie littéraire et photographie. Si Lydia ne t’en a pas encore parlé, voici le titre : « Un monde sans rivage » d’Hélène Gaudy (Actes Sud) et c’est l’histoire avant l’heure d’un confinement dans une nature spectaculaire mais implacable. Voici la 4ème de couverture, je trouve qu’il fait écho à ton conseil (merci) et j’avais envie de partager ma chère amie Françoise
« À l’été 1930, sur l’île Blanche, la plus reculée de l’archipel du Svalbard, une exceptionnelle fonte des glaces dévoile des corps et les restes d’un campement de fortune. Ainsi se résout un mystère en suspens depuis trente-trois ans : en 1897, Salomon August Andrée, Knut Frænkel et Nils Strindberg s’élevaient dans les airs, déterminés à atteindre le pôle Nord en ballon – et disparaissaient. Parmi les vestiges, on exhume des rouleaux de pellicule abîmés qui vont miraculeusement devenir des images.
À partir de ces photographies au noir et blanc lunaire et du journal de bord de l’expédition, Hélène Gaudy imagine la grande aventure d’un envol et d’une errance. Ces trois hommes seuls sur la banquise, très moyennement préparés, ballottés par un paysage mobile, tenaillés jusqu’à l’absurde par la joie de la découverte et l’ambition de la postérité, incarnent l’insatiable curiosité humaine qui pousse à parcourir, décrire, circonscrire et finalement rétrécir le monde.
Livre d’une richesse inépuisable, aussi poétique que passionnant, Un monde sans rivage propose un voyage opiniâtre dans les étendues blanches du Grand Nord, un périple à travers le temps en compagnie de ces trois explorateurs et de bien d’autres intrépides, une méditation sur l’effacement et une déclaration d’amour à la photographie dans ses deux mouvements d’aval et d’amont : fixer les souvenirs et réactiver perpétuellement la machine à rêves. »